Photographie: la fin de l’immobilisme ?

image Mais où est donc passé le Conseil supérieur de la photographie? On est en droit de se poser cette question plus d’un an après la création de cette "instance de réflexion" émanant du ministère de la culture et de la communication (arrêté du 30 janvier 2006). Si lors de la réunion du 13 février 2006, le ministre promettait de mettre en relation les différents univers de la photographie (culturels, professionnels, artistiques, recher- ches, marché, etc.), il semble n’avoir pas vu apparaître de grands débats depuis cette date. Finalement, mis à part quelques crispations institutionnelles (la question des ayant-droit des donateurs à Patrimoine photographique dont les images ont été transférées à la compétence de la direction du Patrimoine, la succession à la tête du Jeu de Paume – bien longue car Marta Gili a attendu de longs mois sa nomination), tout semble bien se passer dans le monde des images fixes… Et si l’on profitait de ce temps de calme pour faire quelques propositions à quelques semaines des élections?

De notre point vue – la Société française de photographie, entre privé et public, recherche et patrimoine, collection et création, exposition et édition – de notre point de vue donc, certaines choses pourraient être envisagées. Tout d’abord la remise à plat de la fameuse question des droits d'usage des images (voir le dernier numéro d’Études photographiques), qui empêchent de travailler sereinement éditeurs, chercheurs, enseignants, etc. dans la perspective de développement de l’édition électronique. Ensuite, poser clairement le problème de l’entretien de notre patrimoine iconographique: comment le rendre plus accessible à tous, comment accéder le mieux possible à des projets de numérisation et de diffusion? La recherche, faut-il rappeler ici, en bon universitaire, à quel point nos doctorants vivent mal, comme tout le corps estudiantin français, le manque d’accompagnement de leurs recherches (financièrement mais aussi professionnellement). A quand un forum sur les métiers et débouchés de la recherche sur l’image et son histoire? D’autres perspectives: pourquoi ne pas songer à un projet d’envergure sur les archives de la photographie contemporaine? La photographie depuis l’après-guerre est en train de s’évanouir: fonds d’agences, de particuliers, archives d’artistes et de professionnels… N’y-a-t-il pas une alternative à la seule loi du marché de notre mémoire collective? Un grand centre de recherche et d’archive sur le modèle de l’IMEC ne serait pas absurde. Depuis l’arrivée de la télévision, la photographie est devenue une image rare, tous ceux qui travaillent sur les revues et autres périodiques la savent: l’image imprimée est difficile d’accès, fragile, souvent ruinée parce que sans valeur à l’origine. Création enfin? La France ne manque pas de centres artistiques pour la photographie mais à quand l’inter-régionalité, même si des expériences et des amitiés entre responsables de lieux se sont tissées, pourquoi ne pas aider à un partage des coûts et une meilleure circulation des expositions qui dégagerait des moyens pour produire les artistes en France? Certes, la photographie se porte bien et l’image avec elle – et si elle allait mieux? La naissance de la photophilie n’est qu’à ses balbutiements, elle a aujourd’hui l’opportunité de montrer des liens directs entre création, recherche et éducation. Profitons-en.

Illustration: Léon Gimpel, négatif en couleurs complémentaires d’un drapeau français, cliché exécuté à l’usine Lumière de Lyon, 1907, coll. SFP.