La loi DADVSI tue le site Internet d'Etudes photographiques

La loi dite DADVSI, sur les Droits d'Auteur et Droits Voisins dans la Société de l'Information est, sous bien des aspects, une loi liberticide. Le vote définitif, qui vient d'avoir lieu à l'Assemblée Nationale, a produit son premier résultat : la fin du site de la revue Etudes photographiques, qui a préféré se saborder pour protester contre l'impossibilité de pouvoir publier l'objet même de son étude.

Par Didier Rykner, La Tribune de l'Art, 01/07/2006.
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Commentaires

1. Le jeudi 6 juillet 2006, 12:15 par Accademia dei Venti

Vous trouverez ci-joint le texte d'une lettre adressée en son temps à notre Ministre de la Culture. La seconde partie sur le droit inaliénable à la curiosité pourrait vous intéresser.

"CANDIDE AU PAYS DE GOOGLE.

Monsieur le Ministre,

Votre dernier article nous a étonnés (« GOOGLE n’est pas la fin de l’histoire », Le Monde 18 mars 2005). Les différents intérêts qu’il révèle ne doivent certainement pas être ignorés en ces temps de discussion sur les garanties sociales du Traité européen.

Vous êtes en effet, comme Ministre de la Culture, le garant du choix, de la multiplicité et donc du droit à la curiosité.

Vous relevez avec pertinence les manipulations auxquelles GOOGLE pourrait se livrer sur les savoirs qu’il affirme indexer objectivement et bientôt sur les 15 millions d’ouvrages qu’il se propose de numériser. Nous sommes d’accord : une recherche organisée selon l’unique critère de la popularité (vérifiée ou supposée) risque de fait de limiter l’accès à notre patrimoine commun.

Mais, proposer des professeurs ou des conservateurs comme gardiens du temple est-il une alternative souhaitable ? N’est-ce pas répondre aux excès de la démocratie par la mise en place d’une théocratie ? La peste de la démagogie remplacée par le choléra de l’argument d’autorité ?

Quelle fenêtre restera-t-il pour tenter l’esprit curieux ?

Si un être humain veut lire Voltaire, pourquoi classer les œuvres soit par le nombre de clics soit par le dernier programme de la Sorbonne.

Nous ne voulons pas choisir entre Zadig, Candide ou Un Russe à Paris.

Votre projet de loi nécessite la mise en place de censeurs qui contrôleront ce à quoi nous aurons droit. Mais ce système nécessite également un contrôle de cette moderne inquisition. Des meta-contrôleurs devront alors étudier le choix des premiers et ainsi de suite, sans que l’on puisse décider pourquoi cet auteur plutôt qu’un autre, ce roman ou cet essai, cette version autorisée plutôt que cette glose bénéficiant de l’Imprimatur.

La puissance de la technologie moderne permet d’évoluer vers le cauchemar d’Orwell le temps de réunir une seule sous-commission.

Des contrôles sans fin, se renvoyant des responsabilités dont on ne connaîtrait pas la teneur… Candide dans une bibliothèque infinie aux rayonnages inaccessibles. Borges et Voltaire dans le même cauchemar.

La diversité annihilée dès sa conception, morte dans l’œuf, tout simplement.

Monsieur le Ministre, vous êtes aussi le principal champion du domaine public. S’il est juste de défendre les nouveaux auteurs, vous vous devez de défendre notre domaine commun en évitant tout « péage » ou toute « douane » pour y accéder. Les générations à venir ont un droit inaliénable à la curiosité, nécessaire pour leur développement.

Quelle est votre vision à 5 ou 10 générations pour l’accès à la culture ?

La multiplication des lois et règlements sur le droit d’auteur est déjà, par certains aspects, susceptible de bloquer l’accès à la culture : de nombreux enseignants renoncent déjà à distribuer des textes et des images à leurs étudiants.

« Trop d’impôts, tue l’impôt », dit le Président.

« Trop de règles, tue le désir », lui répondons-nous !

Au XVIIème siècle, le Pape, dans sa grande sagesse, permettait aux astucieux l’accès à l’Enfer de tous les livres interdits censurés ou caviardés, c’est à dire de tous les livres intéressants.

Nous proposons, plutôt qu’une loi, un label, une infinité de labels qui s’opposent et se contredisent pendant que le texte d’auteur, dans sa version authentique, reste dans le plus simple libre-accès.

Monsieur le Ministre, veuillez recevoir l’assurance de notre soutien critique et respectueux.

Benjamin MARTIN-TARDIVAT
Président de l'ACCADEMIA DEI VENTI "

Nous sommes désolés de ne plus pouvoir nous étonner à la lecture de vos articles en ligne. Nous étions juste des curieux...