Le choc des photos

image Les photographes de presse ont peur. Dans les manifestations, ils sont désormais exposés aux coups et autres lancers d'objets au même titre que les CRS. Choqués, certains s'indignent de cette violence mal dirigée. Les photographes n'ont-ils pas toujours été du côté des opprimés et des deshérités? Voire, semble leur répondre une jeunesse qui ne connaît ni Lewis Hine, ni Robert Capa, mais Le Droit de savoir, et qui sait combien le journalisme sur papier glacé tend à transformer les "casseurs des banlieues" en icônes décoratives, sur fond de voitures en flammes, non sans gourmandise.

Le phénomène suscite réactions et articles. L'équipe du JDL vient même d'ouvrir un nouveau blog intitulé "Images et CPE". On y découvre d'autres images, surprenantes. Celles de photographes casqués et caparaçonnés d'une façon qui n'aura bientôt plus rien à envier à l'armure des CRS (Olivier Touron). Après les reporters embedded en treillis de la guerre d'Irak, on peut comprendre qu'une certaine confusion s'installe. D'autres images, comme le champ/contrechamp ci-dessus, emprunté à Charlotte Gonzalez, qui expose sur Flickr ses vues des manifestations: "Paris in Riots", confirment l'ampleur d'une dérive qui aboutit à situer photographes et forces de l'ordre sur le même plan. Certains, comme Garywald, sur le blog déjà nommé, questionnent les justifications et l'évolution du métier. Interrogations bienvenues. Elles seront, à moyen terme, bien plus efficaces qu'un casque ou un bouclier pour faire cesser des agressions moins “gratuites“ qu'elles n'en ont l'air.

Illustration: "How things were", 28 mars 2006, photo © et courtesy: Charlotte Gonzalez.

Commentaires

1. Le mardi 4 avril 2006, 13:10 par Gilles Klein

"Les photographes de presse ont peur". Le début de votre billet me paraît un peu excessif. Les photographes de presse ont l'habitude de l'insécurité dans les manifestations, où ils sont quelques fois des témoins gênants, lors de violence spolicières, ou des cibles pour certains manifestants.

Des manifestations en France depuis toujours, de l'Afrique du Sud pendant l'appartheid à la Chine de Tien An men, en passant par l'Amérique Latine et ses dictatures, ou les balles perdues de l'armée américaine ajoutées celle de la guérilla en Irak, les photographes de presse sont habitués à se méfier.

Ce qui étonne à Paris, ces jours-ci, c'est le caractère systématique de certaines attaques groupées, mais elles frappent aussi bien un manifestant, qu'un passant, ou un journaliste.

Journaliste et photographe, je n'ai jamais porté de casque quel que soit le pays où j'ai travaillé.


Votre dernière phrase qui évoque "un bouclier" m'étonne aussi. Vous avez vu des photographes bouclier d'une main, et boitier de l'autre ? ;-))