Une première victoire pour les donations photographiques

image Seize collections étaient gérées par Patrimoine photographique: Daniel Boudinet, Marcel Bovis, Denise Colomb, Roger Corbeau, Amélie Galup, Michael Kenna, André Kertész, François Kollar, Thérèse Le Prat, Sam Lévin, Roger Parry, René-Jacques, Bruno Réquillart, Willy Ronis, Raymond Voinquel et le Studio Harcourt, quatorze d’entre elles étant des donations ou des legs.

Le 1er mai 2004, la Galerie nationale du Jeu de Paume, le Centre national de la Photographie et Patrimoine photographique ont fusionné dans l'Association de préfiguration de l'Etablissement public Jeu de Paume présidée par Alain-Dominique Perrin, et dirigée par Marta Gili depuis septembre 2006. Le projet devait aboutir à un EPIC (Etablissement public industriel et commercial). Annoncé pour le 1er janvier 2005, deux ans et demi plus tard ce statut est, selon le Ministère "toujours à l'étude"...

Très vite les donateurs et ayants droit ont exprimé leurs vives inquiétudes quant au respect des engagements de l’Etat actés dans les donations : conservation, mise en valeur culturelle et diffusion commerciale. N’ayant reçu aucune proposition du ministère, ils se regroupent et fondent en octobre 2004 l'Association de défense des donateurs et ayants droit de l’ex Patrimoine photographique (Adidaepp).

Aujourd'hui, que sont devenues les missions de l'Etat? La création du Jeu de Paume a entraîné un éclatement de ces trois missions: la conservation des fonds est confiée à la Médiathèque du Patrimoine, (Direction de l'Architecture et du Patrimoine). Ils sont relégués en banlieue au Fort de Saint-Cyr (Montigny-Le-Bretonneux).

La valorisation culturelle est confiée à Jeu de Paume, sous la tutelle de la Délégation aux Arts plastiques, autre direction du Ministère. Le ministère de la Culture et de la Communication, a récemment confié la diffusion commerciale à la Réunion des Musées Nationaux (un EPIC), une nouvelle fois sans consultation des donateurs et ayants droit qui ont été mis devant le fait accompli. Le transfert des données a été effectué sans qu’ils soient avertis et avant leur autorisation… Aucun contrat, à ce jour, n’est signé. Quant au fonctionnement de l’agence photographique de la RMN, là encore, les donateurs et ayants droit ont de réelles inquiétudes. Plusieurs exemples de dysfonctionnement les ont mis en alerte.

Bilan: Au moment des donations, les photographes ou leurs ayants droit ont donné leurs fonds à une entité clairement identifiée: "Patrimoine photographique", dont la création avait été rendue indispensable du fait de l’importance et de la spécificité de ces collections. Aujourd’hui, ce sont ces fonds historiques qui doivent s’adapter à un schéma administratif tripartite, un jeu fragile de grands écarts où les missions et les responsabilités de chacun ne manqueront pas de se télescoper ou de se diluer.

La conservation: une expertise judiciaire confirme les inquiétudes des donateurs et ayants droit. Le 6 juillet 2006, vingt et un donateurs et ayants droit ont déposé un référé au Tribunal administratif de Paris pour demander la nomination d’un expert en conservation préventive et en numérisation de masse afin d’examiner et d’évaluer les conditions de conservation des collections au Fort de Saint Cyr. Pierre Emmanuel Nyeborg a été désigné. Il a rendu son rapport le 28 mars 2007. Voici quelques-unes de ses conclusions.

On peut donc considérer que les conditions climatiques auxquelles les fonds sont actuellement exposés ne sont pas conformes aux normes en vigueur. (...) Si les collections semblent bénéficier de bonnes conditions en matière de sûreté, de mobilier, d’équipements et de conditionnements tel n’est pas le cas pour ce qui relève des conditions climatiques. (...) Pendant les mois d’août, septembre, octobre 2006 l’humidité a flirté avec un taux de 70 % sans jamais descendre en-dessous des 50 % d’humidité relative. Ceci constitue un facteur aggravant des dégradations des fonds avec un risque élevé de développement de micro organismes. (...) En novembre, décembre, janvier durant lesquels les locaux sont chauffés les températures enregistrées sont supérieures à 15° (...). Il est impératif d’assurer aux fonds des conditions environnementales qui permettront de stopper les irréversibles processus de dégradation.

On est loin des affirmations du Ministère de la Culture! Dans le dossier de presse qui accompagne la visite de Monsieur Renaud Donnedieu de Vabres au Fort de Saint-Cyr le 24 mai 2006, il est écrit: «Les locaux reçoivent une atmosphère contrôlée (humidité relative : entre 30% et 50%)».

Les promesses du ministère. Le 20 juin 2007, le comité des donateurs a été réunion par la Direction de l’Architecture et du Patrimoine. Au cours de ce comité le ministère de la Culture a promis:

  • Le déménagement des fonds photographiques de l’ex-Patrimoine photographique du Fort de Saint-Cyr (Montigny les Bretonneux) à Charenton le Pont dans les anciens locaux de l’école d’architecture ; déménagement déjà annoncé lors de l’Assemblée générale du Jeu de Paume le 25 avril dernier.
  • La création d’un comité scientifique de pilotage chargé de superviser l’aménagement aux normes muséales de ce nouveau lieu, la présidente de l’ADIDAEPP étant invitée à y participer.
  • La création d’un département photo à l’intérieur de la Médiathèque.
  • La nomination d’un conservateur à la tête de ce département.

Les donateurs et ayants droit sont enfin entendus. Le soutien de l’Adidaepp, forte de ses 300 membres, a porté ses fruits. Mais selon l’adage: «les promesses n’engagent que ceux qui les reçoivent». Restons très vigilants!

A notre demande d’un calendrier pour toutes ces opérations aucune réponse ne nous a été apportée. L’ADIDAEPP organisera des rendez-vous très régulièrement pour faire le bilan des avancées. La prochaine conférence de presse aura lieu à l’automne.

Illustration: conférence de presse de l'Adidaepp aux rencontres d'Arles, cour de l'archevêché, 04/07/2007. Martine d'Arc, Françoise Denoyelle, Jean-Claude Lemagny, Véronique Figini (photo: Gunthert).