L'alpha et l'oméga

image Si vous avez passé les dernières semaines en villégiature à La-Petite-Pierre (Bas-Rhin), vous ignorez qu'aujourd'hui était attendu le lancement en grande pompe de l'Alpha 100, le premier reflex numérique siglé Sony. Rappel des précédents épisodes: il y a un an, Sony et Konica-Minolta annoncent leur rapprochement. En mars, on apprend l'arrêt des activités photographiques de la double marque, rachetés par Sony. Suite logique, le reflex présenté aujourd'hui était attendu par les mauvaises langues comme une déclinaison du Dynax D5D. L'Alpha a largement dépassé ces prévisions. Sur une base Minolta, les ingénieurs de la firme ont rassemblé en un seul boîtier des performances jusqu'à présent éparses: un capteur CCD de dix mégapixels au format APS-C, un stabilisateur, un anti-poussières, un nouveau processeur de traitement d'images, un autofocus à 40 points, un écran de visée 2.5", la compatibilité avec les objectifs Minolta et l'annonce d'une vingtaine d'optiques prochainement disponibles (dont plusieurs signés Carl Zeiss), enfin un prix de vente situé en-dessous des 1000 $.

D'où vient que, devant cette hotte si bien remplie, on ne peut s'empêcher de réprimer un baîllement? C'est probablement que cette longue liste de spécifications ne comporte pas une seule véritable innovation. L'Alpha sera certainement une des machines à tenir son rang dans la gamme convoitée des reflex numériques d'entrée de gamme, mais il n'apporte rien de plus que les boîtiers disponibles depuis un an ou deux. De la part de Sony, pionnier de l'image numérique qui a souvent créé la surprise, on ne peut s'empêcher de ressentir une certaine déception. Du strict point de vue de l'innovation, même le bridge Cyber-shot DSC-R1 était plus intéressant, avec son capteur à 10 mégapixels et son zoom 12 x – une vraie tentative de proposer une alternative au reflex. Est-ce parce que les appareils à miroir se doivent d'être plus sages? N'est-ce pas plutôt que cette gamme a désormais atteint une certaine forme de maturité technologique, et qu'il est difficile d'y introduire une rupture décisive? Auquel cas l'Alpha de Sony, avec son large éventail de perfectionnements, offrirait un signe annonciateur de la fin de la fuite en avant des technologies numériques.

Commentaires

1. Le vendredi 9 juin 2006, 14:14 par pmi

Juste une petite remarque, le R1 jugé si innovant a un simple zoom x5 et non x12.
Ce qui fait baîller, n'est ce pas le nom Sony qui est moins affriolant qu'un "historique" de la photo ?
Combien d'observateurs seraient enthousiastes si l'appareil portait le nom de Leica (un exemple typique mais pas unique)?

2. Le vendredi 9 juin 2006, 15:53 par André Gunthert

Merci de rectifier pour le zoom, j'ai dû confondre avec un modèle vidéo ;-)
Pour le reste, vous me prêtez une pensée que je n'ai pas. Pour exemple, contrairement à de nombreux commentateurs, je n'ai pas jugé utile de rendre compte ici de l'annonce du Leica C-LUX 1, déclinaison du Panasonic DMC-FX01 qui n'a selon moi qu'un intérêt cosmétique. J'ai par contre signalé le système de visée partagé par l'Olympus E 330 et le Panasonic DMC-L1 qui, quoiqu'on pense de l'opportunité du dispositif, constitue une innovation. C'est précisément parce que Sony (l'un des fondateurs - avec Canon - des technologies de la photographie numérique) a témoigné à maintes reprises de sa capacité à proposer des innovations majeures, que cet appareil, malgré ses qualités, paraît moins excitant.

3. Le dimanche 2 juillet 2006, 13:11 par Jean-Louis Llech

Bonjour,
"de passage" sur ce site, je souhaitais faire part de quelques observations sur le DSC-R1, qui a été assez injustement accueilli lors de sa sortie. En effet, sans le qualifier de "révolutionnaire", cet appareil a bénéficié de la part de Sony de nombreuses innovations qui n'ont pas été suffisamment reconnues à leur juste valeur.
- C'est le premier appareil digital à objectif non interchangeable doté d'un capteur de type CMOS, (même technique que les Canon EOS-1Ds Mark II) et non CCD.
- C'est aussi le premier appareil digital à objectif non interchangeable offrant un grand capteur APS-C de 21.5 x 14.4 mm, avec un pas de 5.49 µm, ce qui a permis une définition de 10,3 MPix, unique dans cette gamme.
- La consommation d'énergie des CMOS est moins importante que sur les modèles équivalents équipés d'un CCD (environ 3 1/2 fois moins)
- Conséquence de la taille du capteur et de certains autres choix, Sony a pu monter un objectif très grand angle (équivalent à un 24mm en 24x36) ouvrant à f/2.8. En outre, le fait que cet objectif ait été développé par Zeiss est, n'en déplaise à certains, un critère de qualité optique.
- L'amplitude du zoom (effectivement 5x, donc 24-120) est amplement suffisante pour beaucoup de travaux, même professionnels. Il ne faut pas oublier que des amplitudes plus grandes nécessitent une auto-stabilisation, assez coûteuse.

Rappelons qu'une des conséquences de l'objectif fixe est de rendre inexistant le problème des poussières sur le capteur, et donc d'éviter les - coûteux - dispositifs d'auto-nettoyage proposés désormais sur certains appareils. Le dépoussiérage des capteurs des reflex digitaux à objectif interchangeable, (même - et surtout - hauts de gamme) est devenu assez rapidement un problème, et le post-traitement logiciel du dépoussièrage est une tâche très consommatrice de temps.

Pour ceux qui utilisent habituellement des moyens formats argentiques de type Hasselblad, Mamiya ou Rolleiflex, (rappel : avec viseur capuchon sur le dessus du boîtier), l'écran placé sur le dessus et non au dos de l'appareil est assez "sympathique", (même s'il a beaucoup dérangé les utilisateurs de 24x36 argentiques traditionnels et de leurs équivalents digitaux). Il permet la visée à hauteur de poitrine, plus discrète et moins "agressive" que la visée à hauteur d'oeil.

A mon sens, si cet appareil n'est probablement pas conçu pour les utilisateurs traditionnels de 24x36, - ce qui expliquerait l'accueil assez "tiède" dont il a fait l'objet - il est destiné à occuper une place bien à part aux côtés des appareils argentiques moyens et grands formats, avec lesquels il est complémentaire et non concurrent.

Je serai personnellement plus réservé en ce qui concerne le devenir de l'Alpha DSLR-A100. Une monture Sony spécifique, compatible avec les objectifs d'une marque (Konica-Minolta) qui a arrêté sa production photographique (!) et dont les optiques n'ont jamais laissé un souvenir impérissable, si on les compare avec leurs équivalents Canon, Leica, Nikon ou Zeiss.